On a un peu oublié Vicente Huidobro, connu chez nous surtout pour son oeuvre poétique (il est sans doute le plus grand poète du Chili... après Pablo Neruda). Et ce, malgré les efforts récents de quelques éditeurs : les éditions Indigo-Côté-Femmes ont repris en 2002-2003 quelques-uns de ses recueils et manifestes poétiques (Manifestes, Cagliostro, Tremblement de ciel, Tour Eiffel, Horizon carré>) ; Altaigle et Monument à la mer ont paru chez Unes en 1996 ; et son Gilles de Rais a été publié en 1998 par José Corti.
Encore inédite en français, l'oeuvre romanesque de Huidobro en surprendra plus d'un par sa tranquille liberté de ton et d'esprit. Papa ou le Journal d'Alicia Mir (1934), bref récit d'apprentissage qui rompt avec tous les canons du genre, tient la chronique lucide d'un couple qui se déchire sous le regard en alerte d'une jeune fille de dix-huit ans. Aucune moralité, aucune leçon, mais ce constat douloureux, sous un masque de fine ironie : que la vie n'est peut-être que l'art de composer avec ce qui nous manque.