La tribune de Jean Hegland à lire dans L’Obs
Autrice de « Dans la forêt », fable écoféministe au succès phénoménal, et de « Apaiser nos tempêtes », roman puissant sur deux femmes aux prises avec la maternité, l’Américaine Jean Hegland réagit à la décision de la Cour suprême d’abolir le droit fédéral à l’avortement.
Le soir où la Cour suprême a annoncé sa décision de démanteler les droits reproductifs en Amérique, mon mari et moi nous sommes joints à d’autres citoyens consternés qui convergeaient vers la place centrale de la petite ville californienne où nous nous sommes récemment installés. C’était une soirée étouffante, mais malgré la chaleur et l’absence d’informations sur le moment où la décision Dobbs (1) serait publiée, ou même si elle allait l’être, il y avait tout de même une foule importante. Plusieurs centaines de femmes, d’hommes et de personnes non-binaires, de tous âges, se pressaient autour de la place, chacun cherchant un moyen d’exprimer sa peur et son indignation, chacun avide de puiser dans cette communauté rassemblée la force d’encaisser un coup aussi brutal.
Comme personne n’avait eu le temps d’organiser l’événement, il n’y avait pas de programme déterminé, pas d’ordre de passage pour une éventuelle prise de parole d’élus, de politiciens ou d’artistes. Au lieu de cela, quelqu’un avait mis un micro à la libre disposition de tous. Pendant plus d’une heure, nous avons écouté des dizaines de personnes s’adresser à la foule. Certains orateurs ont exprimé leur fureur face à la décision de la Cour suprême et particulièrement envers les trois juges nommés par Trump qui ont menti si effrontément lors de leurs audiences de confirmation, tandis que d’autres partageaient leurs craintes pour l’avenir et sur ce que cette décision hypocrite pourrait signifier pour nos autres droits précieux et difficilement acquis, comme le mariage homosexuel, la fécondation in vitro et même, le contrôle des naissances. Des personnes se sont saisies du micro pour décrire les actions politiques et sociales que nous devons entreprendre afin d’atténuer les conséquences de cette décision. Une femme, qui avait longtemps travaillé au Planning familial local, a parlé des nombreuses personnes qu’elle a pu croiser qui avaient affirmé ne pas « croire » à l’avortement jusqu’à ce qu’elles soient elles-mêmes confrontées à une grossesse non désirée.
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